mercredi 11 juillet 2007

L’avenir de Rue89 dépendra aussi de la pub

Par Philippe Madelin, collaborateur régulier à Rue89

Les bureaux du nouveau site d'information sur Internet Rue89 vont déménager pour la troisième fois. Pierre Haski, ex de Libération, et son équipe ont commencé les opérations à la mi-mai dans sa salle à manger. Ils ont continué dans un entrepôt du 12ème arrondissement. Cette fois, ils s’apprêtent à emménager dans une pépinière d'entreprises développée par la Ville de Paris dans le 20ème arrondissement. Au gré de ces localisations, la bande de Rue89 peut mesurer le chemin parcouru en à peine trois mois.
L'idée de départ était de lancer sur internet, et uniquement sur internet, un véritable organe de presse. Avec une dizaine de journalistes. Toutes les rubriques d'un quotidien. Mais une spécificité inaccessible à la presse papier : un contenu composé à la fois d'écrits, de photos et d'importants apports audiovisuels. Le tout sans grands moyens puisque l'investissement initial a été constitué par les « indemnités de départ » d'Haski et de ses proches, en majorité issus de Libération, et par le matériel que chacun a apporté.
Le défi était d'imposer le site, sa marque, sans support papier. Un " scoop coup de chance " a lancé la machine, quand Rue89 a révélé que Cécilia Sarkozy n'avait pas voté au premier tour des Présidentielles. Depuis le site met l'accent sur l'information exclusive.
Rue89 s'est installé dans la foulée. « On en est à 500 000 contacts par mois », selon Haski, ce qui représente la moyenne haute des sites informatiques. Le site se décline aujourd'hui en anglais (Street89) et en espagnol (Calle89). D'autres développements sont prévus. En particulier, le lancement le 5 septembre sous la direction de Jérôme Garcin d'un site littéraire commun avec le Nouvel Observateur, bibliobs.com. Mais, surtout, la publicité arrive : Haski n'escomptait pas de rentrées financières avant quatre mois, or les premiers contrats de publicité (au tarif minimum il est vrai) permettent de remplir un peu les caisses. Même si on est très loin de l'équilibre. Même si les journalistes ne sont pas encore payés : ils ne sont pas des bénévoles, ils investissent dans l'avenir.
Après deux mois, il est difficile de se prononcer sur l'avenir. Apprécié des internautes, le site est encore loin d'assurer toutes les rubriques d'un quotidien, le politique a tendance à être sur-représenté. Quant au bénévolat des collaborateurs extérieurs (experts, internautes), il a vite présenté les inconvénients attendus : malgré la bonne volonté des uns et des autres, la capacité d'enquête reste relativement virtuelle.
L'avenir se jouera quand les fonds initiaux seront épuisés. Au regard du chiffre d'affaires de la pub.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonjour,
votre point de vue est très intéressant car il montre au moins trois limites :

. la difficulté pour une nouvelle marque de s'imposer dans les plans pub des annonceurs. Si l'audience est au rendez-vous, il n'en reste pas moins un dernier pas à franchir pour gagner vraiment de l'argent (mettons de côté les google ads et autres pub au CPM trop bas).

. cela coûte beaucoup d'argent de créer un site web d'information. Outre les premiers frais de développement, ce sont les salaires et les notes de frais, inévitables pour qui veut faire autre chose que du desk, qui plombent une compta. Il est certain que ne pas payer les rédacteurs permet d'assurer la première étape, à savoir acquérir une audience. Mais réussir à la faire vivre sur le long terme est une sacrée gageure.
D'ailleurs, si certains sites de journaux "classiques" comme Le Monde se targuent d'être bénéficiaires, c'est sans doute grâce à la production de contenu réalisée par les journalistes "classiques". En tout cas, les annonceurs viennent grâce à la marque.


. la relative mauvaise qualité du contenu généré par les utilisateurs. C'est là que le bas blesse : si des bénévoles sont prêts à laisser des commentaires voir à rédiger des billets d'humeur, réaliser un article journalistique prend beaucoup de temps. Qui en dispose "à ce point" ? Les étudiants, les pigistes, les retraités et les engagés dans une cause, prêts à passer du temps pour la défendre ou la promouvoir. On les retrouve tous sur agoravox par exemple.

Voilou :) (pour info je reprendrais ce long commentaire pour en faire un petit post chez moi :)