dimanche 15 juin 2008

La fragile indépendance de l'AFP (2)


Après s'être attaqué à la télévision (étouffement financier annoncé pour France Télévision, enrichissment par la publicité des chaînes de ses amis Bouygues et Bolloré, etc.), qui constitue l'unique source d'"information" pour une grande majorité des Français, les hommes de Sarkozy vont-ils s'en prendre à l'AFP, dont les dépêches abreuvent radios, journaux et internet ?

On pourrait y voir une tentative dans la récente proposition de Christine Albanel, ministre de la Culture et de la Communication, de créer une sorte de " fil" AFP dédié aux communiqués des partis politiques. Une réponse faite à Frédéric Lefebvre, député UMP des Hauts-de-Seine, proche de Sarkozy, qui n'avait pas du tout apprécié que l'AFP ne mette pas illico en ligne sa réaction à la condamnation de Ségolène Royal (à verser des salaires à d’anciens collaborateurs, qui la poursuivaient en justice).
Jusqu'ici Pierre Louette, pdg de l'AFP, semble faire barrage aux attaques, des rangs de l'UMP, contre son agence. Cet énarque a pourtant travaillé au cabinet d' Edouard Balladur à Matignon entre 1993 et 1995 quand un certain Sarkozy était ministre du Budget et porte-parole du gouvernement. Mais si les deux hommes se connaissent, ils ne s'aiment guère. "Dans les couloirs de l’AFP, certains pensent que Super Sarko veut virer Louette, qu’il juge trop peu docile, pour placer un de ses proches. Jean-Pierre Elkabbach, Jean-Marie Cavada, Nicolas Beytout, Arlette Chabot, pourraient très bien diriger l’AFP, avec compétence et indépendance, cela va de soit", pointent des syndicalistes de l'agence.
Créée à la Libération, l'AFP, qui compte 2000 salariés (dont 1200 journalistes) dans le monde, revendique l'indépendance et l'impartialité de sa ligne éditoriale. Son statut lui interdit ainsi d'être directement financé par l'Etat. Seulement, l'Etat français est traditionnellement son premier client puisque 40% de son chiffre d'affaires provient des abonnements de services publics (aux ministères, préfectures, ambassades, etc).
En tant que premier client et membre du conseil d'administration, le représentant du gouvernement français contribue à la fixation du prix de l'abonnement ... au gré des moyens qu'ils souhaitent allouer à l'agence. Il oriente aussi des décisions non anodines telles que la renégociation du plan stratégique de l'agence ou du bail de l'AFP, place de la Bourse. Un emplacement stratégique, au coeur de Paris, qui lui permet de réagir au plus vite au moindre événement. Et de conserver sa place de troisième agence de presse mondiale. A condition de continuer à en avoir les moyens.

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