dimanche 27 janvier 2008

Le "0 pub" contre le "tout gratuit"

Par Nina Perez, journaliste

2007 consacra l'apothéose du leurre de la gratuité. Tout devait l'être. Même les journaux. Au risque de disparaître aux premiers signes de récession économique. Les budgets publicitaires étant généralement les premiers que les entreprises sacrifient en cas de retournement de tendance.
Les journaux qui se sont crées sur internet, comme Rue89 ou bakchich sont de qualité. Ils ont su trouver un ton et fleurer l'air du temps pour des sujets différents, se démarquant des grands médias qui ont le nez collé sur l'agenda (notamment présidentiel). La publicité en ligne n'a pas semblé entacher leur indépendance rédactionnelle. Mais, il est difficile d'imaginer, qu'elle puisse, à elle-seule (la pub par internet étant très peu rémunératrice en France), permettre de financer, à long terme, une équipe de journalistes (salaire décent, moyens de travailler et de se déplacer ...).
C'est dans ce contexte qu'une nouvelle race de chevaliers est apparue en ce début 2008 : les "0 pub". Le futur site d'informations Mediapart ou le nouveau magazine de grand reportage XXI, lancé mi-janvier par l'éditeur Les Arènes, font le pari de vivre en se passant de la manne apportée par les annonceurs.
Convenant que la publicité corrompt, tant les intérêts des acteurs de l'économie et du politique sont aujourd'hui mêlés, ces titres espèrent vivre du seul pécule apporté par leurs lecteurs. Tel est, pour eux, le prix d'une presse indépendante, enquêtante, décodante et impertinente. Ils veulent croire que suffisamment de citoyens, exigeants et en quête de sens critique, soutiendront la démarche.
Les journalistes sont les premiers à espérer que le pari fonctionne (il en va de la survie de leur métier dans un monde de la communication). Si ce n'était pas complètement le cas, que ces nouveaux médias ne se privent pas, pour des (nobles) questions de principe, d'une manne facile. Il est possible de ne pas se faire dicter la loi par la publicité. En attirant des annonceurs qui partagent une éthique commune. Ou, en suivant l'exemple de nos confrères de "La feuille", un journal satirique plus que trentenaire du Lot-et-Garonne : accepter la pub, et, au moindre coup de fil mécontent de l'annonceur (par rapport à un papier), rédiger un article détaillé sur le contenu de l'échange téléphonique ... Au moins l'annonceur est prévenu des règles du jeu !

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