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dimanche 26 août 2007

Quand on substitue l'expert au journaliste (1)

Par Philippe Madelin, écrivain d'investigation

Si vous visitez la rédaction d’une station de radio (d’information continue ou non), vous serez surpris de découvrir devant les postes de travail des journalistes des listes de personnes assorties de leurs numéros de téléphone portable. Un examen attentif de ces listes permet de constater qu’elles collationnent les noms de tous les spécialistes identifiés dans chaque domaine de l’actualité.
Plus qu’un simple fichier, cet outil permet aux jeunes journalistes dénués de contacts personnels de pouvoir interroger rapidement des « experts ». Le fond n’importe peu. L’essentiel est que le journaliste puisse appuyer son texte d’information d’éléments sonores qui apparaissent comme des illustrations brèves – dix à vingt secondes - dans des interventions dont la durée d'antenne n’excède pas la minute. Ce système permet à la station de radio de convaincre les auditeurs qu’ils sont des privilégiés puisque les « experts » acceptent de délivrer leurs connaissances au grand public.
Tout ça part d’une apparente volonté d’expliciter l’événement le mieux possible.La réalité est moins glorieuse, nous retrouvons le principe des listes. Chacune est constituée par ordre décroissant de réputation, de « bruit médiatique » en quelque sorte. Le journaliste contacte chaque « expert » l’un après l’autre, la première réponse positive interrompt le balayage : le sonore est enregistré, l’intervention mise en onde. L’exigence de rapidité passe souvent avant celle de la qualité, de la crédibilité, voire de l’indépendance (par rapport à des organismes publics ou privés) de l’interviewé.
Je suis bien placé pour savoir, étant moi-même tenu pour un expert dans mes domaines de prédilection, la police et la sécurité. Au gré des événements, attentats, incidents de police ou autre fait divers, sans raison cohérente, j’apparais sur telle ou telle radio, suivant les besoins des jeunes journalistes, selon ma place dans la liste.